L'Ennui

Publié le 20 avril 2021 à 18:24

 

Chanceux désœuvrement

 

Ah l’Ennui ! Ce sentiment est sûrement le plus authentique de notre existence. Il est si redouté, tant incompris, et tellement mal vécu… Serait-il imaginable de s’ennuyer joyeusement ? A la formulation de cette simple question, nous grimaçons ! Cela paraît bien difficile. Les journaux ne clament pas de gros titres, tel que « les plaisirs et les vertus de l’Ennui », et ne chantent pas les bienfaits de cette célèbre lassitude morale. Sommes-nous fatalement défectueux lorsque nous nous ennuyons ? A l’instar d’une machine à coudre fonctionnant sans aucun tissu pour son aiguille, en cognant à répétition contre la plaque de fer, en ne tissant aucun accoutrement, et où seul un bruit disgracieux en résulte… l’Ennui, c’est comme la flemme, ça ne sert, a priori…à rien. Cependant, il serait bien pire que sa meilleure amie car non désirée. La flemme est de ne rien faire à la place de quelque chose.  L’Ennui est de ne rien faire à la place de…rien. Si nous voulions en sortir, nous devrions invoquer notre créativité, prisonnière alors par l'inanité lui-même. Ces instants nous suscitent une profonde mélancolie, reflet de l’absence de sens, du caractère changeant de l’existence et enfin de l’évanescence du vide. Trois perspectives peu réjouissantes ou le mal être de cet état prend, cette fois-ci, tout son sens. Pourtant, si nous faisions un pas de plus, nous pourrions y voir la quiétude. En effet, l’Ennui n’est objectivement aucunement une situation inquiétante : rien de mal ni de bien ne s’y passe…alors pourquoi tout n’irait justement pas bien ? N’est-ce pas à ce moment précis qu’il faut étendre dignement le drapeau « rien à signaler » ? Nous cherchons, sans cesse, à évaluer chaque instant de notre vie. Si chacun était une note, nous voudrions dépasser systématiquement la moyenne. Or parfois, la juste moyenne donne la même issue qu’une note supérieure à cette dernière. Psychiquement, je ne crains que la situation apparaisse bien plus complexe à notre esprit. L’Ennui est l’état renvoyant le vide extérieur, laissant alors place uniquement à celui de notre propre intérieure. La projection hors de notre propre être se fait ici impossible. Nous nous retrouvons seul avec nos pensées désœuvrées. Essayer de combler ce moment par le chaos serait une incitation au déchirement, néfaste pour la suite et autodestructeur. La situation devrait plutôt être abordée comme un encouragement à la paix avec ce que nous sommes. La méditation frappe à notre porte, ne serait-ce pas une sage discipline, voie du bonheur, selon Psychologie Magazine ? Alors, ayons peut être moins peur de cet ennui : soyons reconnaissant de la chance d’avoir ce moment de paix extérieur, certes au plus près du néant existentiel, or qui nous apporte l’opportunité bénite de se réconcilier avec lui. L’aimer c’est comprendre, pardonner, et surmonter le vide de vivre. A ce stade-là, nous y avons tout à gagner. A votre aise, sans injonction ni obligation, de le combler ou peut être de le sublimer.

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