La Flemme

Publié le 2 mars 2021 à 21:07

Ode à la flemme

 

La flemme retentit, à la fois, comme une sensation légère d’une plume et pesante telle une brique. Pourquoi donc cet oxymore ? A ce moment où elle frappe à notre porte, nous rêvons intensément de rester toute la journée dans notre plumard ou une brique, accrochée à notre cheville, semble nous y clouer. A longueur de journée, nous entendons le récit disant que chaque matin est un don, une chance, une nouvelle page blanche, une opportunité, le moment d’embrasser la vie, de sauter dans ce tourbillon à pieds joints joyeusement... Cette charmante mélodie est certes séduisante et convaincante, jusqu’alors la flemme arrive. Nos pensées dévient de ce droit chemin, si vanté, et empruntent des ruelles étranges et cachées. Nous choisissons intentionnellement de nous y perdre car elles sont, au fond, intrigantes. A Rome, un touriste suivra la grande avenue centrale qui mène directement, sans détour, au Colisée. Il suit ce fameux droit chemin conseillé, simple, efficace, emprunté par le plus grand nombre. Or, il détourne une seconde son regard à gauche. Une ruelle apparait. Le soleil est trop loin pour l’éclairer. Il s’arrête pour la regarder longuement et hésite rapidement. Pourquoi dévier ? Se ralentir dans notre emploi du temps au risque de manquer la visite de l’incontournable Colisée. Cette ruelle, elle, n’est pas dans le guide. Toutefois, une voix malicieuse le pousse à y jeter un coup d’œil. Il longe, doucement et calmement, ce nouveau chemin de traverse. Il est différent, surement rationnellement inutile et sans logique intérêt. A part nous faire perdre un peu de notre prétendu précieux temps, nous ne saurons dire sa fonction dans l’itinéraire. Il suffira seulement d’apercevoir un café, à l’angle de cette dernière, pour y voir, à l’intérieur, un trouvaille exquise. Charmant et simple, nous nous y arrêtons pour y pratiquer, avec sérieux, l’oisiveté. La flemme pourrait ainsi porter le nom de cette ruelle : imprévue, inutile, et séduisante. Avec elle, nous pensons avoir gâché notre temps mais au contraire nous nous y sommes défait. Ce pas de côté arrête la spirale temporelle de la course contre la montre. Il n’est plus question de laisser notre corps être une machine aux rouages parfaits : nous sommes plus que jamais humains. Arrêtons alors de blâmer notre flemme car sans elle, le répit ne serait jamais permis.

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